La CSCCA dévoile un diagnostic sévère sur quinze années de gestion budgétaire en Haïti
La Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) a rendu public un rapport d’une ampleur exceptionnelle consacré à l’évolution des finances publiques haïtiennes de 2009 à 2024, document qui met en lumière des fragilités structurelles persistantes malgré plusieurs réformes adoptées au fil des années. Présenté devant les autorités gouvernementales, les institutions internationales et la société civile, ce travail marque un tournant pour l’organe supérieur de contrôle, qui s’éloigne de ses rapports techniques habituels pour proposer une lecture globale de l’état budgétaire du pays.
L’étude rappelle que des progrès normatifs avaient été enregistrés, notamment avec l’adoption de la Stratégie de Réforme des Finances Publiques en 2014 et la Loi du 4 mai 2016 modernisant le processus d’élaboration et d’exécution des lois de finances. Mais ces avancées, pour significatives qu’elles soient, n’ont pas suffi à transformer la gestion concrète des ressources publiques. Selon la Cour, la mise en œuvre des réformes a été trop lente pour produire des effets tangibles dans un environnement institutionnel marqué par l’instabilité, la contraction des recettes et la détérioration des capacités administratives.
Le rapport souligne que les déficits de mobilisation fiscale, l’absence d’arbitrage clair dans les dépenses, la fragilité de la soutenabilité budgétaire et les insuffisances en matière de transparence continuent d’entraver toute perspective de redressement. La CSCCA insiste notamment sur le fait que l’architecture juridique, bien qu’enrichie, n’a pas encore trouvé son expression opérationnelle dans les pratiques quotidiennes de l’État, laissant les finances publiques exposées à des risques récurrents.
Dix enseignements majeurs sont tirés de cette analyse, accompagnés de pistes d’action jugées prioritaires par la Cour pour rétablir la discipline budgétaire, renforcer la reddition de comptes et réorienter la dépense vers des investissements capables de soutenir la croissance. La CSCCA estime que ce corpus de recommandations peut constituer une base commune pour les pouvoirs publics et les partenaires internationaux, alors que la situation économique nationale appelle des décisions structurantes et une cohérence institutionnelle accrue.
En arrière-plan, la Cour rappelle que la gestion des finances publiques n’est pas uniquement une question de technique administrative, mais un élément déterminant de la stabilité nationale et de la confiance collective. L’institution affirme que seule une modernisation effective des pratiques budgétaires permettra de consolider l’État et d’offrir aux citoyens les garanties d’un usage responsable des ressources.
Cet appel, formulé dans un contexte économique et politique fragile, fait désormais figure de signal adressé à tous les décideurs. La CSCCA place chacun devant l’exigence d’une gouvernance rigoureuse, continuellement surveillée et clairement orientée vers l’intérêt général.









